2. Des MAEC presque sur mesure 2. Des MAEC presque sur mesure
Quasiment absentes de l'ancienne programmation, les MAEC systèmes arrivent en force. Les régions peuvent choisir de les ouvrir un peu, beaucoup... ou pas du tout.
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Les MAE ne sont plus, place aux MAEC : mesures agro-environnementales et climatiques. A côté de ce détail sémantique, l'évolution principale est l'arrivée des mesures « système ». Jusqu'en 2014, une seule mesure (Systèmes fourragers économes en intrants, ou SFEI) reposait sur un engagement de toute l'exploitation. Aujourd'hui, à chaque système correspond peu ou prou une MAEC.
Nouvelles autorités de gestion, les Régions avaient le choix de les ouvrir ou pas, de les zoner ou non. Sans sortir du carcan national, il leur revenait également d'ajuster certains indicateurs. Le montant d'aide, bien que variable d'une région à l'autre, résulte généralement d'une méthode de calcul fixée par l'Etat. Enfin, certains critères sont définis au niveau du territoire, à l'intérieur du double cadre national et régional.
La MAEC « systèmes herbagers et pastoraux », ou SHP (1)
Pour qui : les herbagers extensifs, ayant au moins 10 UGB (5 pour les petits ruminants), au moins 65 % d'herbe et moins de 1,4 UGB/ha (critères pouvant être durcis en région).
Pourquoi : maintenir des surfaces en herbe à fort intérêt écologique. Soutenir les herbagers de plaine qui perdent la PHAE sans avoir l'ICHN.
Comment : le cahier des charges est basé sur l'ex-PHAE, avec des pratiques (fauche, pâture, fertilisation...) imposées sur toutes les surfaces en herbe. S'y ajoute une obligation de résultat sur des « surfaces cibles » identifiées lors de l'engagement. Les critères sont fixés par l'opérateur (parc, chambre d'agriculture...) à l'échelle du territoire, dans un cadre national éventuellement précisé au niveau régional.
Gain : tout dépend du risque de disparition des pratiques évalué sur le territoire. La fourchette nationale va de 58 à 147 €/ha.
Où ça peut coincer : la présence de quatre plantes indicatrices (parmi une liste de vingt fixée au niveau du territoire) doit être contrôlable chaque année dans les « surfaces cibles ». Tout se jouera dans la liste arrêtée par l'opérateur, qui peut retenir des espèces courantes pour permettre au maximum d'éleveurs de souscrire la mesure ou sélectionner des espèces bioindicatrices. Francis Letellier, président de la FRSEA de Bourgogne, craint d'y voir des « mauvaises herbes qu'on ne trouve normalement pas dans les prairies bien exploitées ». Le succès de la mesure dépendra aussi des moyens mobilisés. Le Rhône-Alpes s'attendait à un franc succès car les parcs régionaux ont développé la MAE Prairies fleuries, qui comportait une exigence de résultat semblable. Mais l'ampleur des intentions de mobilisation sur cette mesure a été telle que la Draaf, qui assure le cofinancement national, l'a réservée aux entités collectives et zones de plaine, davantage concernées par les risques de déprise ou d'intensification.
Au choix des régions : la plupart propose la SHP comme substitut à la PHAE. La mesure peut aussi constituer une alternative à l'aide bio pour les éleveurs herbagers. La Basse-Normandie n'a pas ouvert la SHP mais elle rend la mesure « polyculture-élevage » accessible aux éleveurs ayant jusqu'à 100 % d'herbe.
La MAEC « systèmes polyculture-élevage », ou SPE dominante herbivores ou céréales
Pour qui : les polyculteurs-éleveurs de ruminants avec au moins 10 UGB (sauf en zones intermédiaires). La frontière entre les dominantes élevage et céréales est définie en région par la part de cultures dans la SAU.
Pourquoi : éviter la spécialisation des systèmes et favoriser l'autonomie alimentaire des élevages.
Comment : le cahier des charges s'inspire de l'ancienne mesure SFEI, mise en place par le réseau agriculture durable en 1995 avant de devenir nationale. Le cadre national impose le maintien des prairies permanentes, une baisse de l'IFT et un plafond de concentrés achetés, tandis que la région fixe les deux critères de base : un seuil d'herbe dans la SAU et un plafond de maïs dans la SFP. Ces deux objectifs doivent être atteints en année 3 dans le cas d'une évolution de pratiques (situation la mieux rémunérée), ou respectés dès la première année dans le cas d'un maintien de l'existant.
Gain : plus l'objectif en termes de pourcentage de maïs dans la SFP est éloigné de la référence régionale, plus la prime est élevée. Il y a donc peu à gagner dans les régions très herbagères. En Franche-Comté, où la ligne de base est à 15 % de maïs, la SPE dominante élevage n'offre que 47 ou 73 €/ha (respectivement en mode « maintien » ou « évolution ») pour respecter un plafond de 5 %. Dans le Centre, où la ligne de base est à 39 % de maïs, on touche 263 €/ha pour passer sous la barre des 25 %. Montant record en Basse-Normandie : 400 €/ha pour ceux qui passent sous 12 % de maïs !
Où ça peut coincer : la clé de voûte de la mesure est l'assolement (lire ci-dessus). Le reste doit en découler. Néanmoins, diviser par deux l'IFT hors herbicides et réduire de 40 % l'IFT herbicides par rapport à la référence du territoire peut s'avérer compliqué pour la dominante céréales.
Au choix des régions : à part la Paca et le Languedoc-Roussillon, toutes les régions ont ouvert la mesure. C'est même la seule mesure « système » disponible en Limousin. La Bretagne est très volontariste sur cette mesure, comme elle l'avait été sur l'ex-SFEI. Elle a ouvert la SPE herbivores sur 100 % de son territoire et propose trois niveaux : 12, 18 et 28 % de maïs/SFP. Avec une ligne de base à 38 % de maïs, le budget MAEC aurait pu exploser... Plutôt que zoner la mesure ou la plafonner à quelques hectares, comme d'autres l'ont fait, la Bretagne a négocié le droit de s'écarter de la calculette nationale pour fixer ses montants. Même revus à la baisse, ils restent plus attractifs que ceux de l'ancienne SFEI. A 130 €/ha pour 18 % de maïs, celle-ci avait déjà séduit 1 200 éleveurs, ce qui permet à la région d'espérer 4 000 signataires pour la nouvelle SPE herbivores (trois niveaux confondus). Le Poitou-Charentes a également ouvert la mesure sur tout son territoire. Cependant, les niveaux d'exigences fixés risquent d'exclure nombre d'exploitations. Ce qui inquiète le président de la chambre d'agriculture régionale car, « pour l'élevage en zone de marais, la MAE participe à l'équilibre économique et financier des systèmes ».
Variante : la MAEC « systèmes polyculture élevage », ou SPE monogastriques
Pour qui : les exploitations de polyculture-élevage avec un atelier monogastrique, dont une partie de l'aliment (pourcentage à fixer par territoire) est fabriqué à la ferme ou à façon. La frontière avec la SPE herbivores est déterminée par la région (nombre d'UGB, part d'herbe).
Pourquoi : développer l'autonomie alimentaire en favorisant les interactions entre atelier végétal et animal.
Comment : le cahier des charges est plus proche de la MAEC « grandes cultures » que de la SPE. Il impose un assolement diversifié avec 5 % minimum de légumineuses, une baisse de l'IFT, un raisonnement de la fertilisation et le maintien de deux fois plus d'infrastructures agroécologiques que le verdissement l'exige.
Où ça peut coincer : « Les 5 % de légumineuses qui ne peuvent pas recevoir de fertilisation retirent 5 % de surfaces pour l'épandage : chez nous, cela signifie une perte de droits à produire », souligne la Bretagne, qui ne s'attend pas à un fort engouement malgré les 140 €/ha à la clé. En outre, la baisse d'IFT est plus difficile à atteindre qu'en élevage d'herbivores.
La MAEC « systèmes de grandes cultures », ou SGC (avec versions adaptées aux zones intermédiaires et aux cultures légumières ou industrielles)
Pour qui : les exploitations avec au moins 70 % de cultures arables et moins de 10 UGB. Ces critères sont assouplis pour les versions adaptées.
Pourquoi : accompagner la transition vers l'agroécologie.
Comment : la mesure s'inspire, entre autres, des travaux du Réseau agriculture durable des Civam, qui a développé puis testé un cahier des charges « grandes cultures économes » chez 55 agriculteurs volontaires entre 2008 et 2012 (lire ci-contre). « Ce cahier des charges a été amendé par les instituts techniques et l'administration, puis les arbitrages politiques ont tranché dans le vif », rapporte Alexis de Marguerye, qui a animé le projet. En fin de course et bien qu'allégé, il comporte encore des exigences conséquentes sur la diversification de l'assolement (avec 5 % minimum de légumineuses) et des rotations, et surtout la baisse d'IFT. Il est possible de n'engager qu'une partie de ses terres éligibles (mais au moins 70 %) : la baisse d'IFT n'est exigée que sur ces surfaces, qui sont les seules rémunérées. Le reste du cahier des charges porte sur toute l'exploitation.
Gain : plus l'IFT baisse, plus la prime augmente. Tout dépend donc du niveau d'engagement choisi. Le niveau 1 impose une baisse de 30 % de l'IFT herbicides et 35 % hors herbicides en année 5. Le niveau 2 exige respectivement - 40 % et - 50 %.
Où ça peut coincer : « La marche est haute pour l'IFT », note Antoine Henrion, président de la chambre de Moselle, qui s'« interroge sur la volonté des agriculteurs à s'engager ». « En maïs semences, cela ne va pas être simple », prévoit aussi Yves François, élu à la chambre d'agriculture de l'Isère.
L'insistance du syndicat majoritaire a permis d'aménager la mesure pour les zones intermédiaires. L'exigence de baisse d'IFT y est réduite : - 20 % pour les herbicides et - 35 % hors herbicides (en année 5). La rémunération est plus faible que pour la version classique.
Au choix des régions : la plupart de celles qui ont ouvert la mesure propose les deux niveaux d'engagement sur l'IFT. Certaines, comme la Lorraine, n'ont conservé que le plus exigeant. Seules les régions dans les zones classées « intermédiaires » pouvaient ouvrir la version adaptée. Le Poitou-Charentes, dont les quatre départements sont concernés, n'a pourtant ouvert que la mesure classique. « La version adaptée n'est pas assez exigeante et ne permettra pas d'atteindre les objectifs d'une meilleure qualité de l'eau », assène le conseil régional.
Le Nord-Pas-de-Calais a ouvert, à côté de la SGC classique, la version adaptée aux cultures légumières et industrielles, avec des critères d'assolement et d'IFT aménagés.
Les MAEC localisées
Comme les anciennes MAE territorialisées, elles sont constituées de combinaisons d'engagements unitaires décrits dans un catalogue national, qui a peu évolué. Ils ne portent que sur des parcelles ciblées. Certains sont cumulables avec des MAEC systèmes.
Les MAEC génétiques
Comme en 2007-2013, elles portent sur la préservation des races animales, des ressources végétales et du potentiel pollinisateur des abeilles, avec un cahier des charges national. Elles sont cumulables avec d'autres MAEC.
(1) Seule la version individuelle est détaillée ici. Une version collective de la MAEC est proposée aux groupements pastoraux.
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